Le petit village de Wyamdé, au nord du Togo, est recouvert de suie, donnant au paysage un aspect quelque peu lunaire. Le cœur du village bat fort, rythmiquement, sainement, martelant la pierre contre l’acier chauffé au rouge.
– Combien pèse cette pierre, 10-15 kilos ?
– Plus c’est lourd, mieux c’est. Cela dépend du forgeron. Il doit frapper fermement le fer rouge. Il ne peut pas se permettre une erreur.
Une erreur entraîne une blessure grave et des accidents peuvent arriver. Il n’y a pas de machines sophistiquées, ni d’outils professionnels ici. Une femme attise assidûment les flammes dans un four en argile équipé de deux soufflets en peau de vache. Un homme attend qu’un morceau de jante en acier brille au rouge. Au lieu d’un marteau de forgeron, une pierre de granit ; au lieu d’une enclume, un morceau de roche granitique.
Des hommes construits en titane, des machines faites de sang, d’os et de muscles durs comme le granit, redonnent vie aux vieilles jantes de voitures, les transformant en houes et en charrues.
Le four émet une chaleur intense, avec 40 degrés même à l’ombre. L’air est lourd et stagnant. La sueur coule de mon front rien qu’en regardant le forgeron travailler. Je ne connais pas de travail plus difficile. Je suis reconnaissant pour le mien. Les habitants de Wyamdé ont mon plus grand respect.
Mateusz Gasinski